Le couple homo, sketch, Pierre Palmade et Michèle Laroque

Le couple homo

(Cliquer ci-dessus pour regarder la vidéo)

Accessoires : Deux chaises, deux verres, une bouteille d’armagnac.
Personnages : Marie (Michèle Laroque, notée ML) et Pierre Palmade (noté PP).
Situation de départ : PP est assis sur la chaise de gauche par rapport au public. ML est debout entre les deux chaises.


ML : Oh ben chéri, j’ai oublié d’te servir ! (elle va chercher à boire) armagnac pour toi aussi ?
PP : Oh moi, juste une goutte mon cœur, hein ?
ML : En tout cas, on avait vraiment envie de dîner avec vous, ce soir. Hein, chéri ?
PP : Ah ça, Marie tenait absolument à vous inviter, (en les montrant du doigt) hein ? Oh et puis alors, toute la semaine ça a été « Est-ce que ça va leur plaire ? Oh le vin, oh la décoration ! » hin hin hin Marie !!
ML : Ben, c’était une grande première pour moi, hein ? J’savais vraiment pas si vous mangiez... euh… comme nous, heu, heu , heu !
PP : Non c’est vrai, Alain on, on connaissait ses goûts, enfin… certains de ses goûts, mais on savait pas du tout c’qu’aimait… Roberto !
ML : Ecoutez, moi tant pis ! J’mets les pieds dans l' plat mais j’vais vous dire un truc, humhum : vous-al-lez-très-bien-en-semble !
PP : Vraiment, on dit pas ça parce que vous êtes là hein. Alors p’t-être qu’on est un peu marginaux…mais, ça nous dérange pas une seule seconde que vous soyez… là, ce soir !
ML : Et puis un couple c’est un couple ! Si vous êtes heureux comme ça, y’a qu’ça qui compte ! Hein, chéri ? (elle s’asseoit) 
PP : Bien sûr…
ML : Y’a tellement de gens dit "normaux" (elle mime des guillemets) qui sont pas du tout fait l’un pour l’autre, hein chéri ? C’est c’qu’on s’disait l’autre jour hein… hein ?
PP : Hum !
ML : Bah, qu’est-ce qu’on s’disait l’autre jour ?
PP : Et bah, c’que t’es en train d’dire !
ML : Ah oui ! hin, hin, hin ! Et puis là au moins, on est sûr qu’y’aura pas d’enfants qui trinquent ! Hin, hin, hin, hin !!
PP : (il rit jaune) Allez, tiens d’ailleurs on trinque ! (il se lève) Alors ça c’est un vieil armagnac (il prend la bouteille), alors celui-là, on m’la rapporté du Gers, et…
ML : Eh ! Roberto ! Un vieil armagnac et non pas un vieillard maniaque !! ha ha ha ha ha (elle se plie en deux) !! C’est un jeu de mots, français ouais ! Je sais pas si on peut bien le traduire en brésilien (elle regarde Alain) hein ?
PP : C’est pas très grave. Et alors, heu, Roberto… vous avez appris où, l’français ?
ML : Dans l’avion ? mais y’a combien d’heures de vol ? Ah non c’est d’l’humour, c’est d’l’humour…
Tous les deux : (ils rient jaune)
ML : Alors justement, comment ça s’passe pour vous ? Vous pouvez bénéficiez des réductions de couples ? Comme nous, en fait.
PP : Et puis quoi encore ? … Mais ça viendra ! hein ? Non mais dès qu’les gens auront un peu… dans vingt, trente ans… 
ML : Oh oui… ?
PP : Il est pas exclu que vous ayez les mêmes droits qu’nous…
ML : Oui et puis si ça s’trouve, c’est nous qui devrons nous cacher, hin hin !
PP : Ben ’manqu’rait plus qu’ça, heu heu ! On a rien fait, nous…
ML : Et puis moi j’dis, si ça s’trouve, c’est vous le couple de l’an 2000 ! (il se met derrière elle et lui met la main sur l’épaule) Vous vous affichez, vous vous foutez de c’que les gens disent et vous avez bien raison, et Dieu sait qu’les gens disent de ces trucs, ah si si si si si… si, vous vous en rendez pas compte parce qu’ils le disent pas d’vant vous mais ça y va, hein ! Oh là là, mon pauvre Alain, si tu savais…
PP : Ça ! depuis qu’t’es rentré du Brésil…
ML : Ca débine sec, hein ! Non, on expliquait à Alain que les gens disent énormément de mal de vous. Oh il a l’air tout triste, oh c’est mignon, hein ? Eh ben c’est ça qu’j’aime bien, moi, chez les pé… (il lui tape sur l’épaule) chez les gens comme vous ! Ils sont plus sensibles que les autres, hein, chéri ?
PP : C’est pas pareil ! (il va s’asseoir) Et alors, euh…, vous vous êtes rencontrés à Rio, hein ? En discothèque, voilà, c’est ça, c’est c’que j’ai cru comprendre.
ML : (elle chantonne la musique du carnaval de Rio et elle rigole) C’est marrant d’ailleurs, parce que moi quand j’vais en boîte, j’en vois jamais… 
PP : Hum hum hum !
ML : Ah c’est des boîtes où y’a que ça ? Que vous ? Que ça comme vous ? Et ben comme dans les boîtes africaines où y a que des… 
PP : Hum !
ML : (elle se lève) Ah très bien… hein chéri, t’as compris ?
PP : Oui j’ai compris oui, chui pas idiot !
ML : (elle se sert à boire) Et alors euh, vous vous êtes plu et puis c’est tout, oui y a pas à chercher plus loin, hein ? Ha ha ha ! D’ailleurs on dit UNE rencontre mais UN coup de foudre ! 
(il se tourne vers elle, l'air interrogateur)
ML : Ben c’est masculin !… Si, si... ! (elle retourne à sa chaise sans s’asseoir)
PP : Et alors, heuu…, Alain… Je crois savoir que ta femme a pris la nouvelle un peu moins bien qu’nous… Ben oui, forcément ! Avec ton fils, euh…, j'voulais savoir, ils ont sensiblement l’même âge avec Roberto …heu.
ML : Et-quel-âge-vous-av-ez-Roberto ? Diz no one ? Dix-neuf ans, oh le bel âge !
PP : Et Alain 48 ! Dans deux mois ? Oui enfin… donc avec ton fils, euh, ça va. Ah i' s’connaissent pas ? Ah, carrément i veut pas le voir ! Oh là là là là.
ML : Par exemple, mince alors ! C’est marrant qu’il accepte pas, hein ? Comme quoi, on peut être jeune et pas forcément accepter… Ça, pour ça, nos enfants, j'crois qu’y sont assez, euh…
PP : Assez quoi ?
ML : Et ben euh, je sais qu’j’les ai jamais entendu dire des mots comme heu : "tapette" heu… "pédé" ou heu… » (elle revient vers lui) même "homo" jcrois qu’ils le disent pas, hein chéri ?
PP : Oui, en même temps, l’aîné a six ans, chérie ! C’est p’t-être un peu normal !
ML : Oh c’est dommage qu’ils soient couchés, j’aurais adoré qu’ils vous voient, (à lui) c’est vrai, ils en ont jamais vu !
PP : Ben oui, mais ils sont couchés, hé hé ! Ce s’ra pour une autre fois !
ML : (elle se plit en deux) Ah oui, on s’revoit ! (elle se tourne vers lui) Hein chéri, on s’revoit !
PP : Bah oui, nous, oui, on s’voit tous les jours. 
ML : (elle se relève) Non… (en les montrant du doigt)
PP : Mais eux, par contre, je sais pas s’ils ont envie d’nous r’voir. Hein ? Sacré Alain !
(elle vient près de lui)
PP : C’est drôle, hein, quand même, moi qui pensais te connaître de A à Z…
ML : Oui, ou de A à Z T !! Ha ha ha ! Ouh pardon !!! Oh pardon, c’est l’A
rmagnac… hein, ça m’est sorti comme ça, pardon ! Oh y’a pas mort d’homme, hein… 
PP : Oui, j’crois surtout qu’on est tous un peu fatigués, hein ? Et puis alors demain, tout le monde travaille… enfin p’t-être pas… Roberto mais… Alain j’crois qu’t’as une grosse affaire à plaider, d’main.
ML : Ouais, et il vaudrait mieux qu’il ait les yeux en face des trous, hin hin!
PP : Voilà, allez (il se lève) ouste ! Tout le monde regagne ses pénates !
(il vont tous les deux à gauche par rapport au public)
ML : Et la prochaine fois, Alain, on vient chez toi ! Chez vous ? Ah bah d’accord, on vient chez vous, on vous prend au mot !
PP : Allez, Alain au revoir (il lui sert la main), au revoir Roberto (il veut lui serrer la main mais doit lui faire la bise)
ML : Et moi j’vous fais la bise à tous les deux, pas d’jaloux ! On a bien rigolé, hein, on s’rappelle… Attention Roberto, vous marchez sur votre châle ! (elle revient) Ecoute, ils sont charmants !
PP : Oui.
ML : Lui, le petit, il est très, heu… (elle enlève ses chaussures)
PP : ...très efféminé.
ML : (elle s’assoit sur la chaise de gauche par rapport au public) Un peu maniéré, oui, mais il est jeune hein… 
PP : Ah ben très jeune, plus jeune après c’est mineur ! Non, j’m’excuse, on a eu le remake de la cage aux folles toute la soirée, merci bien les deux tarlouzes ! (il passe derrière les chaises) « Et j’vous présente mon nouvel ami, heu… attention Roberto tu vas tacher ta jolie chemise ! ». L’autre folasse avec son châle, chaque fois qu’il va aux toilettes, on dirait qu’y nous fait un défilé d’mode ! Le Alain, il la regarde avec des yeux, il a découvert la cloche à fromage, lui hein ? Avec sa Victor - Victoria de Prisunic... Plus jamais ça chez nous ! (il fait « non » du doigt et se dirige vers le bar) 
ML : Mais t’exagères tout !
PP : Toi j’sais pas c’qu’y t’faut… C’est quand même très gênant pour les autres, ils se tiennent la main, t’as vu ça où ? Moi j’savais plus où m’foutre
ML : Bah quoi, nous aussi on s’tient la main ! (elle lui prend la main)
PP : (il lui lâche la main) Mais ça n’a rien à voir, nous on s’aime, nous on est hétérosexuels ! Nous on a pas trente ans d’écart (il s’assoit), et puis aux dernières nouvelles, je n’suis pas brésilien. Grotesques, les deux tapiolles !
ML : Heureusement qu’les enfants sont pas descendus, hein chéri ?
PP : Arrête avec ce « hein, chéri » ! J’te jure, j’ai été obligé d’être d’accord avec toi toute la soirée ! Couple de l’an 2000 ? C’est une trouvaille ? Couple de l’an 2000, mon cul ! J’m’excuse, c’est pas le Alain qu’on a connu ça !
ML : (elle se lève) Ça c’est vrai que quand il était avec sa femme, il était moins, heu… j’sais pas il f’sait moins euh…
PP : ...il f’sait moins pédé, oui ça c’est sûr !
(elle prend les verres et se dirige vers les coulisses)
PP : Qu’est-ce tu fais ?
ML : Bah, euh, j’range les verres !
PP : Tu ranges pas les verres, tu les jettes !
ML : Quoi ?
PP : T’as vu comment il était maigre, l’autre gigolo ? (il vient vers elle)
ML : Oui mais enfin chéri, j’pouvais quand même pas mettre des préservatifs sur les verres ! 
PP : J’vais t’dire c’qu’y fallait faire, fallait pas les inviter c’est tout. (il va devant sa chaise)
ML : Ça c’est vrai qu’c’est gênant d’le fréquenter, cet Alain maintenant, hein ?
PP : Quand je pense qu’on s’est douchés ensemble (il met son poing droit devant sa bouche et sa main gauche à la taille)
ML : Quoi ? couchés ensemble ?
PP : DOUCHÉS ensemble ! Qu’est-c’tu crois qu’on f’sait après les matchs ? J’ai des visions d’horreur tout d’un coup. A quoi i' d’vait penser quand j’ramassais ma savonnette ?… 
ML : Oh non… Mais non chéri, pas à cette époque-là !
PP : Mais y’a pas d’époque pour ça ! Quand c’est là, c’est là, et puis c’est tout (en se tapant le ventre et en faisait le geste de faire un nœud) ça les… y sont… et puis, oh putain ! Berk, ça me…
ML : Oh là là, pourvu qu’la concierge les ait pas vu passer !
PP : Alors, là, on est bien d’accord, c’est jamais chez nous qu’i' sont v’nus !
ML : Moi je m’demande,  (en les tapant la jambe avec son pied), moi je m’demande si tu dois l’garder pour ton procès contre la CRÉAM, réfléchis bien quand même. (elle va reposer les verres)
PP : Mais c’est tout réfléchi, de quoi tu m’parles, tu penses que j’vais m’faire défendre par la grande Zoa ? D’ici qu’il arrive dans un joli fourreau noir avec Joséphine Baker derrière, bah la CRÉAM, elle n’aura que tout c’qu’y m’reste, hein.
ML : Ah ouais, hein... ! Mais concrètement, comment ça s’passe les courses, le linge, la cuisine, (en comptant sur ses doigts) oh et le blablablinblin ?
PP : Le quoi ?
ML : Et bah le, j’vais pas t’faire un dessin, i' font ça comment, eux ?
PP : Ecoute, on va pas rentrer là-d’dans, hein ?
ML : Mais, moi, j’aimerais bien savoir qui fait l’homme.
PP : On s’en fout !
(elle sursaute)
PP : D'toute façon, ils ne mettront plus les pieds ici ! Et je ne veux plus en entendre parler ! D’ailleurs ça n’a jamais existé !
ML : (elle lui masse les épaules) D’accord, t’énerve pas, chéri. C’est les initiales de quoi PD ?
PP : Pauv’e dinde !
ML : Ben, comment tu m’parles !
PP : Mais non, tu m’demandes une définition de pédé, j’t’en donne une, voilà…
ML : Oh ! Et moi qui croise sa mère tous les jours, oh la la. Demain quand j’la vois, j’lui dis euh… bah il faut sur-tout pas qu’j’la croise demain, hein.
PP : Allez, j’crois qu’ça va bien pour ce soir, on va s’coucher (il se lève)
ML : D’accord (elle ramasse ses chaussures et va vers les coulisses)
(il la rattrape par le bras et elle se retourne)
PP : Eh, et t’inquiète pas chérie, nous on est mariés, on n’a rien à s’reprocher. Et, quand j’vois ça, j’me dis qu’on a d’la chance. Nous, on vit une vraie histoire d’amour. Allez, je monte.
(il veut l’embrasser mais elle baisse la tête donc il lui fait un bisou sur le front et part vers les coulisses)
ML : Chéri, si j’ai peur, j’pourrai v’nir dormir avec toi ?

Comments

Popular posts from this blog

Bah ou ben ? Ne pas confondre ces deux interjections.

La pause, sketch d'Albert Dupontel, avec texte intégral

Une noix, chanson de Charles TRENET, un véritable poème